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  • Fabienne Zufferey-Corbaz

Un été

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L’été transpire parce qu’il doit satisfaire des milliers de vacanciers en attente de promesses.

De son brillant solstice au doux repos du prochain équinoxe, il endossera le poids des plaisanciers en quête d’évasion, priera pour l’éclat d’un soleil ni trop pâle ni trop brûlant, implorera la pluie qui encouragera nos jardins à produire, et nos fleurs à séduire.

Au-delà de la juste quantité de ces sources de vie, le soleil et la pluie, nos jolis projets courraient le risque d’une compromission, bien mal venue dans un scénario minutieusement pensé, préparé et même payé!

Ainsi en va-t-il de la lourde responsabilité d’un été acclamé par la foule, celle qui ne manque de rien.


Pendant ce temps, beaucoup de nos semblables luttent pour leur survie.


Mon été s’est présenté haut en couleur au sein d’une arène chantant nos opéras préférés. Puis il s’est retiré de ces beaux atouts.

Une fatigue intense s’est installée en moi, sans bonne raison, hormis la sienne qui ne commet aucune erreur. Ce fut ma première consolation.


La seconde s’est clairement manifestée face à la chance de pouvoir quitter mon agenda, adapter mes sources d’intérêts, et surtout honorer cette possibilité de ne rien faire.

Ailleurs, des hommes et des femmes continuent de résister à l’adversité.

Les agréments d’un été prolifique, si agréables soient-ils, ont quitté l’avant de ma scène.

J’ai rejoint la simplicité, le dépouillement des habitudes, l’observation plus fine de mes ressentis, et rencontré cette lenteur qui fait peur, probablement parce que nous ne la connaissons plus. Cette lenteur, je l’ai apprivoisée, puis aimée.


Elle s’est présentée tel un coup de frein me permettant de voir défiler devant et autour de moi des images nouvellement définies.

Auparavant, dans la randonnée si chère à mon cœur, j’entrais dans le rythme de mes pas, le regard posé sur mes pieds. De temps à autre, je m’arrêtais, levais la tête vers les cimes jusqu’à embrasser l’horizon.


Cette fois, à l’heure de la fraîcheur matinale, j’ai osé mes pas fatigués sur le sentier arborisé du petit lac du Mont d’Orge. Je croyais le connaître bien. Un endroit de paix qui accueille toutes les populations, des plus jeunes aux aînés, en passant par les joggeurs et les convalescents.

Ce matin-là, je l’ai perçu encore plus beau, plus vivant, plus irradiant. Je crois que je l’ai vu par le filtre du bonheur qui m’habitait. Le ralentissement laissait paraître les petites merveilles que les grandes enjambées ignorent. J’avais le sentiment que ma joie, elle aussi, s’expansait.


Dans ce même temps, des populations entières n’atteignent plus la respiration du cœur.

Chaque matin, j’ai accueilli l’été tel qu’il s’est présenté, sans attente.

À mon grand étonnement, la joie ne m’a jamais quittée, je ne manquais de rien.


À l’entrée de l’automne, la fatigue s’est reculée, vérifiant ainsi l’assimilation de son enseignement. Elle m’interroge sur le sentiment de perte, parce qu’entre ses lignes, je comprends qu’elle n’est pas arrivée seule.

Elle m’a offert la douceur de l’instant, juste pour ce qu’il est, un regard plus vaste sur le simple et la réjouissance redoublée de balades en pleine nature.

J’ai le sentiment et même la certitude que sous mes pas renouvelés d’aisance, la nature se dévoilera toujours plus belle, plus sonore, plus parfumée qu’à l’accoutumée.

La fatigue a engagé la lenteur, celle qui m’a permis de Recevoir.


Je pense à tous ceux qui subissent l’incohérence d’un monde sur le déclin.


Puissé-je garder mes pensées claires, poser mon regard sur le vrai, et me joindre à celles et ceux qui invitent à la paix.


Je vous souhaite la douceur de l’automne.


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